«Il existe des non-dits qui tuent. Nous avons été si peu
protégés par le gouvernement français et considérés
comme des traîtres par notre propre pays. Devenus des
nazis aux yeux de tous, nous avons été déportés dans les camps
russes. Et, à la Libération, nous avons subi la suspicion des
Américains que nous considérions comme nos libérateurs !
Durant notre enrôlement de force, nous avons été tenus à
l'écart de toute information sur l'évolution du conflit. Ainsi,
nous avons vécu un dédoublement permanent de notre être
profond, obligés de donner une façade de soumission tout
en nous battant à l'intérieur contre cette guerre que nous
refusions. Beaucoup d'entre nous refusèrent de tuer, parfois
au prix de leur vie. Les plus forts ont résisté, les plus faibles
se sont effondrés sous le poids de la culpabilité qui n'était pas
la nôtre mais celle qu'on nous imposait.
Nous avons tous vécu une violence morale inouïe.»