Faire dialoguer Mallarmé avec Édouard Manet, Berthe Morisot, Claude Monet, Jean-François Raffaëlli, Odilon Redon, Edgar Degas, Auguste Renoir, Édouard Vuillard, James MacNeill Whistler, Paul Gauguin ou Debussy, c'est d'abord mesurer la place - à la fois centrale et invisible - que Mallarmé occupe dans le champ littéraire et artistique qui voit la naissance de l'Art moderne. Pour le poète, le Naturalisme, l'Impressionnisme, le Symbolisme doivent être rapportés à une crise plus générale qui ébranle les fondements mêmes de la représentation, que celle-ci soit esthétique, politique ou religieuse.
Ce dialogue et cette crise mettent en évidence la diffusion d'un paradigme nouveau dans la pensée des interrelations artistiques. À l'opposé de l'oeuvre d'art totale de Wagner, le Poème selon Mallarmé, fait jouer les arts entre eux, non en les additionnant, mais en les réduisant à leur principe, qui est le langage compris dans son fonctionnement symbolique immanent.
Ce jeu entre les arts explique alors la forte diffusion de l'oeuvre mallarméenne dans l'Art abstrait et l'Art contemporain, à travers ses re-créations dans des oeuvres de Pierre Boulez, Marcel Broodthaers ou Michalis Pichler : le nom de Mallarmé, tel qu'en lui-même son historicité le change, devient ainsi un point d'observation privilégié d'un autre tournant esthétique majeur : celui qui change progressivement l'oeuvre « moderne » en sa relève « post-moderne ».