Malraux
Le passeur de frontières
Si, comme le dit Malraux, « l'homme ne se construit qu'en poursuivant ce qui le dépasse », il va devoir franchir des frontières. Sans cesse. Car, une fois une frontière franchie, il devra en franchir une autre, pour ne pas être englué en lui-même, chosifié, pour que son style ne devienne pas répétition. Pour que sa vie et son style soient vifs, comme une métaphore.
Et cela est vrai pour l'artiste qu'il fut, pour l'homme engagé qu'il était, pour le colonel de la guerre civile espagnole et de la Deuxième Guerre mondiale, pour l'homme politique et le grand ministre qu'il décida d'être. Pour celui qui passa du roman au cinéma, à l'essai et aux méditations sur l'art.
Et, s'il nous éduque et nous apprend quelque chose dans ce devoir de passer les frontières, c'est qu'il en a franchi plus d'une au péril de sa vie, au risque d'échouer et de perdre, de se perdre, de paraître ridicule, d'être ridiculisé : frontières de la vie et des engagements, frontières de la mort et des oeuvres, frontières des arts et des pensées.