L'utilisation de la musique comme remède est aussi ancienne que la lyre de David,
mais l'idée qu'elle pourrait être une cause sérieuse de maladie physique ou mentale
date de la fin du XVIIIe siècle. Ce sont les médecins des Lumières qui ont commencé
à prétendre qu'une musique excessive ou du mauvais genre pouvait conduire à la
dépravation, à la maladie (impuissance, stérilité, neurasthénie, hystérie) et à la mort.
Depuis cette époque, des vagues successives de panique dénoncent régulièrement
les ravages qu'elle cause au système nerveux, depuis Wagner jusqu'au jazz et au
rock'n'roll.
Dans l'Allemagne nazie et la Russie soviétique, la musique est prétexte à des
persécutions fondées sur un discours psychiatrique. Aux États-Unis, dans les
années 1950, où son emploi sous forme de «lavages de cerveau» et de «messages
subliminaux» est censé briser les volontés, manipuler les esprits, déclencher des
désordres mentaux et pousser au suicide, elle fait l'objet de nouvelles préoccupations.
Plus récemment, le développement d'armes soniques et la torture au moyen de la
musique dans la «guerre contre la terreur» continuent à faire redouter qu'elle puisse
nuire gravement à la santé.
Contribution originale à l'histoire de la médecine et de la musique, ce livre retrace
l'origine et l'évolution de l'idée de «musique pathologique» depuis les Lumières
jusqu'à nos jours.