Les Mémoires de la comtesse de Boigne constituent un témoignage de première importance sur la société française et européenne des dernières années de l'Ancien Régime à la fin de la monarchie de Juillet.
Comme toute oeuvre mémorielle, ils sont à utiliser, dans le domaine de la précision historique, sinon avec réticence, du moins avec prudence. Ce n'est pas tant la société qui intéresse la comtesse que la façon dont elle-même y évolue, à la fois sur le plan personnel et sur le plan de sa pensée politique. Le monde qu'elle nous donne à voir, dans ses variations, dans ses bouleversements, face aux attitudes parfois choquantes de ses contemporains, n'existe que par l'image qu'elle en a et par le rapport qu'elle entretient avec lui.
On comprend dès lors que ce ne sont pas là des mémoires d'historien, mais les souvenirs d'une femme lucide, qui jette sur la société qu'elle a connue un regard souvent impitoyable.
Les Mémoires de la comtesse ne sont donc pas à lire comme un ouvrage historique, mais comme la lente et patiente reconstitution d'une personne et d'une pensée dans un monde dont les changements radicaux ont altéré l'intégrité et la compréhension qu'elle a pu avoir des choses et d'elle-même.