Il fallait peindre, et peindre encore,
jusqu'à la nausée, peindre dans l'inconfort
de postures forcées, peindre debout, assis,
agenouillé ou accroupi, raidi par l'immobilité,
muscles contraints, tête baissée, ou
se tenir longtemps couché, le nez dans le
plâtre et les couleurs délayées, en fermant
les paupières contre les projections, de
même qu'en sculptant contre les éclats
du marbre, et lorsqu'il se redressait pour
essuyer les brosses, une si rude fatigue
accablait ses muscles et lui serrait les os
qu'il avançait bossu, nuque torse, vertèbres
jointes et, plein de tourment, s'accrochait
un instant à la rambarde avant
de se risquer sur une échelle, doutant s'il
pourrait redescendre sans être précipité
au sol, et si ce vertige lui venait de l'étourdissement
des sens ou de la tentation du
vide.
A. F.