Pour comprendre l'apport de Ghelderode au théâtre, il faut bien
sûr tenir compte des caractéristiques du champ littéraire à l'époque,
connaître quelque peu le travail de ses contemporains, s'intéresser
aux théories futuriste et expressionniste... Cependant, l'observateur
passerait à côté d'une part essentielle de l'oeuvre s'il n'attachait un
instant ses pas à cette culture belgo-flamande ayant servi de
ferment au travail de l'écrivain (d'où notre intérêt pour le carnaval
et la peinture de Ensor). Car son génie fut probablement de créer un
vaste texte de facture moderniste qui dirait sa culture sans oublier
de tendre vers l'universel. Dans Les Entretiens d'Ostende, il
réfutait l'idée d'oeuvre nationale pour lui préférer un néologisme :
«Une oeuvre patriale, une oeuvre enfin qui fut de chez moi,
ancestralement, traditionnellement, tout en étant une oeuvre
accessible aux hommes de mon temps et de partout.»