Mon Dieu, je ne vous aime pas
Pour saisir l'originalité du contenu de ce livre, rien de mieux que l'avant-propos de l'auteur : « Je savais bien qu'un jour il me faudrait en découdre. Me dire, à moi-même d'abord, puis à qui veut l'entendre, les raisons souterraines d'une étrange complicité qui lie depuis plus de dix années un prêtre [l'auteur] encore jeune à une vieille femme déjà morte. Deux êtres dissemblables et que tout séparait : l'inviolable frontière qui court entre la vie et la mort, on l'a dit, puisque Marie Rouget, « en poésie Marie Noël », comme le rappelle sa simple épitaphe, mourut un soir de décembre 1967, âgée de quatre-vingt-quatre ans, et je n'étais encore qu'un jeune enfant. Comment me suis-je, beaucoup plus tard, lié à cette dame vénérable qui, de l'extérieur, semblait un monument de littérature et de piété, comment m'a-t-elle même dicté certains choix essentiels, comment tant de fois a-t-elle pu, par-delà l'affreux fossé du tombeau, me consoler, m'encourager, m'aiguillonner ? Quel mystère dort dans ces textes, qu'un jour ont réveillé les questions angoissées d'un jeune homme ? (...) Il faut chercher ailleurs : dans la foi, je veux dire dans cette lutte contre Dieu que, depuis Jacob, livrent tous les croyants, d'où ils sortent à la fois vainqueurs et blessés. »