Fin 1989-début 1990, l’impensable se produit : l’effondrement de l’Union soviétique signe l’arrêt de mort de la République Populaire de Mongolie. La nouvelle constitution adoptée 1992 instaure une démocratie parlementaire et une économie de marché en lieu et place de l’idéologie marxiste-léniniste. Ce mouvement voit naître une revitalisation sans précédent d’un sentiment nationaliste étroitement corrélé à une quête des racines. La recherche des traditions occupe dès lors une place centrale dans la définition d’une identité mongole ; Gengis Khan devient la figure de référence. Un immense enthousiasme conduit les intellectuels à jouer un rôle majeur dans ce mouvement de l’histoire : Sendenjav Dulam est de ceux-là. Fils d’éleveurs, ethnographe, spécialiste de mythologie, de chamanisme et de symboles, poète, ce grand chercheur occupe des fonctions politiques et des responsabilités au sein du Comité d’organisation des grandes célébrations « traditionnelles » nationales. Son exceptionnel témoignage rend compte d’une culture en mouvement tiraillée entre des modèles contradictoires et fait entrer le lecteur dans la vie quotidienne des nomades et des Mongols contemporains. S. Dulam retrace ici le sens d’une vie consacrée à la recherche et au service de l’Etat. Il démonte les mécanismes de sa contribution à la mise en forme des symboles nécessaires à la construction de la nation, mais il livre aussi ses doutes et ses positions face aux profondes mutations contemporaines.