Publié en Angleterre en 1905, traduit en français en 1954 par son ami, l'écrivain et critique Charles Mauron, Monteriano est le premier roman d'E. M. Forster. Quelques années avant le célèbre Avec vue sur l'Arno (adapté au cinéma en 1986 par James Ivory sous le titre Chambre avec vue), Forster y explore déjà le thème du voyage initiatique et du choc des cultures : la société anglaise étriquée de Sawston confrontée aux sortilèges d'un petit coin d'Italie, modelé sur la cité toscane de San Gimignano.
« Philippe fixait son regard sur le campanile d'Airolo. Mais ce sont les images du beau mythe d'Endymion qu'il voyait. Cette femme restait, jusqu'à la fin, une déesse. Nul amour ne pouvait être dégradant pour elle : elle était hors de ce qui se dégrade. Ce dernier épisode, qu'elle jugeait si vil, qu'il jugeait si tragique, lui offrit, en tout cas, une beauté suprême. Philippe se sentit porté à une hauteur telle qu'il eût pu, désormais, sans regret, avouer à la jeune fille sa propre adoration. À quoi bon ? Tout le merveilleux était arrivé. »
E. M. Forster, Monteriano, chapitre x, 1905.
« Sous les bicyclettes et les chiffons à poussière, sous Sawston et l'Italie, Philippe, Harriet et Miss Abbott, se dissimule toujours pour lui - et c'est ce qui fait de lui le plus tolérant des satiristes - un noyau d'incandescence. C'est l'âme ; c'est la réalité ; c'est la vérité ; c'est la poésie ; c'est l'amour ; c'est ce qui prend diverses formes, transparaît sous divers déguisements. Mais c'est ce qu'il lui faut atteindre ; c'est ce dont il ne saurait se détacher. »
Virginia Woolf, « Les romans d'E. M. Forster », 1927.