Il fut le plus grand de tous. Celui qui, après Howard Pyle, hissa l'illustration au rang d'un art majeur. Innombrables furent ses disciples, mais nul, depuis, ne l'a égalé. Newell Convers Wyeth (1882-1945), né à Needham (Pennsylvanie) d'une lignée, par son père de pionniers américains liés à toutes les péripéties de l'Indépendance, et par sa mère de Suisses bernois rongés par la nostalgie du pays perdu, fut la plus grande figure de cette « école de la Brandywine » qui marqua l'âge d'or de l'illustration américaine : pas de moins de 4 000 oeuvres, 132 livres illustrés, sans compter ses fresques murales et ses publicités ! Une oeuvre prodigieuse, protéiforme, comme un coffre aux inépuisables merveilles. L'Île au trésor, Robin des Bois, Le Roi Arthur, Robinson Crusoë, Le Dernier des Mohicans : si fortes étaient ses images, d'une telle puissance évocatrice, d'une charge onirique si intense qu'elles devaient marquer des générations d'Américains - et de cinéastes. Les pirates hollywoodiens, à leur meilleur, sortent tout droit des pages de L'Île au trésor, les tableaux qu'il ramena de son tumultueux périple dans l'Ouest ont inspiré les plus grands réalisateurs de western, le Moyen Âge d'un Richard Thorpe et de ses émules est d'abord celui rêvé par N. C. Wyeth, jusque dans les costumes et les couleurs. Nourri des théories d'Howard Pyle sur l'imagination créatrice, en cela héritier des romantiques allemands, il peut véritablement être dit le créateur d'une mythologie, l'initiateur d'un art proprement américain.