La lecture partagée de L'écharpe rouge d'Yves Bonnefoy, dernière oeuvre - en prose - d'un grand poète, est la source de ce livre. Le dialogue qu'ont conduit les deux auteurs est né d'une double énigme, qui les a doublement intrigués.
Ils ont, d'une part, rencontré l'énigme d'un ouvrage tout à la fois testamentaire et inaugural, sans cesse saisi et transporté par l'énergie d'un recommencement. D'autre part, parmi les multiples entrées offertes au lecteur par Bonnefoy, ils ont été confrontés à l'énigme d'une enquête menée par un narrateur à la recherche d'une image qui retiendrait en elle le chiffre d'une vie (et qui rend peut-être compte de l'intimité contrariée du poète avec la psychanalyse). Cette enquête, ils l'ont vite découvert, lève sur son passage d'innombrables autres images et d'autres écrits eux mêmes hantés par l'image introuvable. C'était là se retrouver au coeur du problème de l'image, tel que Bonnefoy n'a cessé de le penser et de l'écrire, aussi bien dans son oeuvre poétique que dans ses textes théoriques ou historiques.
Autre entrée peut-être plus surprenante, le dialogue a permis de mesurer à quel point des notions comme celles de présence ou de finitude, si familières à l'auteur de L'écharpe rouge, s'ouvraient, par leur étonnante fécondité historiographique, aux attentes de deux historiens de l'expérience.
Réunies autour d'une lecture qui n'est pas seulement celle d'un livre mais d'une oeuvre entière, les deux voix de ce dialogue voudraient aussi inciter qui les lira à faire l'expérience sans fin des figures de soi autour desquelles s'enroulent les écharpes rouges d'Yves Bonnefoy.