La mondialisation est-elle irréversible? Vide-t-elle les démocraties de leur contenu en plaçant hors de leur portée les mutations économiques et sociales qu'elle engendre? Condamne-t-elle les mouvements de gauche à une posture de résistance sans alternative? À toutes ces questions, beaucoup répondent volontiers positivement. Pourtant, la comparaison de notre mondialisation avec celle qui, de 1870 à 1914, transforma l'économie nord-atlantique, souligne la faiblesse de ces analyses. La «première mondialisation», si l'on considère notamment l'expérience de la France, n'empêcha pas les États de mettre sur pied des politiques de redistribution et de jeter les bases de ce qui deviendrait un jour l'État-providence. En outre, elle rencontra sur son chemin une gauche internationaliste qui y vit une occasion de sceller la solidarité entre travailleurs par-delà les frontières. Enfin, cette mondialisation que nombre de nos prédécesseurs voyaient déjà comme le nouveau sens de l'histoire se fracassa sur la Première Guerre mondiale. Dans cet essai, Suzanne Berger fait du regard sur l'histoire un regard sur nous-mêmes, nos défaillances, nos erreurs et nos raisons d'espérer.