Nous avons tous migré sur la terre car nous sommes beaucoup plus originaires des tours que fait la terre autour du soleil et de la terre qui tourne sur elle-même que de la terre qui ne tourne pas ; beaucoup plus originaires du ciel où tournent toutes les planètes que d'un pays ou d'un autre pays.
Celui qui pense tenir sous ce titre un manifeste, un plaidoyer, celui-là ne fait pas fausse route ; mais qu'il oublie pour un moment ce qu'il entend jour après jour au sujet du « fait migratoire ». L'échelle de temps et d'espace de ce long poème en prose, cette épopée, cette cosmogonie, excède littéralement à l'infini ces représentations journalières.
Car les acteurs de cette histoire, vraiment, c'est nous : nous dans l'illimité de l'univers, nous sur la terre qui tourne sur elle-même et autour du soleil ; nous dans la perpétuelle succession du jour et de la nuit, dans la lignée interminable de nos ascendants et de nos descendants ; nous, venus d'on ne sait où, on ne sait quand, avec nos yeux qui toujours nous reportent au loin et nos jambes qui toujours les suivent - nous tous migrants, donc, et même pas tant par devoir de conscience que par constitution, par notre vrai destin commun.