Avec Yann Miralles, l'écriture prend en elle "toute la profusion
du réel" - jusqu'à y rendre sensible même "ce trou
au coeur des choses" où, douleur parfois, attente toujours
d'un instant d'union plénière, elle se renouvelle. Le poème
est acte, geste de voix, et activité continue du tout-relation
qui fait la vie : "c'est violence et tendresse/des mots qui
s'unissent/& des corps".
Oui, les "saisons" ! Car c'est bien du temps qui se fait, se
refait dans la parole - moins saisie impatiente du présent
que tentative espérante toujours recommencée, recommençante
: "l'ancien le récent/se frôlent s'enlacent/forment/des
vies éteintes ou possibles ou re-/continuant".
Comme vivre, le poème re-continue sans cesse et, avec
Yann Miralles, il poursuit, ici, et pour nous, ce que Paul
Celan y entendait déjà : il "persiste aux confins de lui-même
; il se révoque, il se reporte sans relâche, afin de
durer, de son déjà-plus à son toujours-encore". Et c'est
une longue adresse alors, paroles, "flèches" tirées dans la
distance pour mettre "un peu d'ici/ dans ce là-bas", qui
trouvent leur cible en réinventant qui les projette.
Incontestablement, avec Ô saisons ô, Yann Miralles
touche au coeur.
Philippe Païni