Qu'on ne s'y trompe pas. Le terme «opacité», qui brille
d'un éclat noir au titre de l'ouvrage, ne renvoie ni à une
ineffabilité supposée ou prétendue de la peinture, ni non
plus à des énigmes que comporterait la mise en peinture
ou en figure, mais à la pragmatique contemporaine, en
un sens dont on trouvera l'élaboration dans La Logique
de Port-Royal ou dans la sémiologie augustinienne.
Tout signe est à la fois une chose et une représentation :
considéré comme chose, le signe focalise sur lui-même
la «vue de l'esprit», il ne représente rien mais se présente
lui-même. Comme représentation, il se dérobe à la
considération et déplace la vue de l'esprit de lui-même à
l'objet qu'il signifie. Le signe est alors comme la vitre
transparente qui laisse voir autre chose qu'elle-même :
lorsqu'elle s'opacifie, elle cesse de se dérober dans sa diaphanéité
pour s'offrir à la vue et l'arrêter.
Ainsi la représentation de peinture qui, tout en représentant
l'univers naturel, les hommes et les fracas de leur
histoire, les créatures invisibles, le monde surnaturel, n'a
de cesse de déployer les dispositifs complexes de présentation
de ses représentations, de travailler et de faire
travailler, dans ses «images» et ses «signes», leurs
divers modes de présentation et jusqu'au sujet-peintre
qui les met en oeuvre dans les «sujets» qu'il représente :
opacités de la peinture.