Notre expérience quotidienne met au jour, pour peu que l'on y
prête attention, la nature paradoxale du langage humain : à la
condition de partager une même langue, nous nous comprenons
parfaitement... et ce dans un (quasi) perpétuel malentendu, le plus
souvent ignoré.
A l'origine de ces mésaventures se trouve le symbolique qui, plus
encore que le rire, est le propre de l'homme. Lien séparateur, il est au
fondement tant de l'existence de son langage que de la structure de la
langue. Grâce à lui, celle-ci ne se réduit pas à un jeu d'étiquettes régi
par des règles componentielles ; à cause de lui, il ne suffit pas de
parler une même langue pour se comprendre. Sur la base de significations
qu'elle propose, le sens émerge d'une alchimie interdiscursive
dont le creuset est un individu socialement ancré. Le chercheur en
sciences sociales, n'échappant pas à la commune humanité, doit, plus
que tout autre, se défier de l'illusion de la transparence du sens. C'est
à une telle propédeutique que le lecteur est convié.
On trouvera ici, outre une conception de la langue et du discours
permettant la constitution d'un observatoire du langagier, un outil de
distanciation, sorte de "machine" à extraire des interprétations
possibles, dans le cas particulier où un énoncé peut être vu comme
mettant en jeu plusieurs sources énonciatives.