L’ouvrage se propose de montrer le sens qu’il y a à s’orienter, en politique, par affinités, tout en distinguant la logique affinitaire d’une logique identitaire et clanique discriminante, et en questionnant son rapport à la prise en compte de la coexistence non choisie des êtres humains, avec la pluralité de leurs préférences et de leurs genres de vie.
Il propose la thèse suivante : c’est paradoxalement l’orientation affinitaire, sensible, consciemment partiale, plus qu’une prétention à s’orienter d’après des raisons, qui est la plus à même de faire une place à la coexistence de la multiplicité, parce qu’elle reconnaît l’absence de principe et donc l’illégitimité de toute prétention à l’uniformisation du monde. Elle ne comporte pas par elle-même de prétention à réduire le multiple à l’un, et donc de prétention à l’hégémonie.
Cette problématique conduit à poser la question de la place de la raison dans le domaine politique (et donc aussi à questionner les rapports entre la pratique de la philosophie et la politique), à penser le rapport entre pensée logique et sensibilité politique (un des enjeux étant de proposer une définition de cette dernière). Par là, c’est aussi une éthique des choix politiques qui est esquissée.
Elle conduit aussi à revisiter l’histoire de la pensée des affinités et de l’amitié politiques, et à préciser les liens entre politique affinitaire et de l’amitié, critique de la politique des programmes et des institutions, et critique de la domination, ce qui permet d’apporter un éclairage sur la question des rapports entre alliances, amitiés, inimitiés,dans les luttes politiques, ainsi que sur les mouvements politiques non institutionnels qu’on a vus émerger ces dernières années (par exemple les mouvements des places).
Enfin, dans la mesure où la logique affinitaire est anti-hégémonique, anti-institutionnelle, le livre la montre à l’œuvre dans certains féminismes radicaux, lieux privilégiés de l’articulation entre la partialité des orientations politiques et la prise en charge de la coexistence non choisie, ce qui permet d’articuler la critique féministe et la critique politique de la philosophie, pour proposer, peut-être, une autre manière de philosopher, et une autre manière d’articuler réflexion philosophique et engagement politique.