«Écrivez-moi un livre où vous me parlerez de vous à la première personne», demande un éditeur à l'une de ses amies. Celle-ci accepte la proposition, parce qu'elle y trouve un moyen d'évoquer son enfance et son adolescence dans le Grenoble des années trente, son amour «insensé» pour l'école, sa vie entre deux familles pour lesquelles ses affections, douloureusement, se partagent. Elle se revoit pendant la guerre et l'Occupation, recueillant des échos, des bribes de l'hétéroclite. L'éditeur, à qui elle remet régulièrement ses pages et avec qui elle en discute dans un dialogue sans ménagements, lui témoigne sa déception: «Vous vous cachez derrière les faits!» C'est que la narratrice ne se résout pas à livrer ce fin fond, ce moi secret dont on lui fait commande. Et son désir de se soustraire à l'intime complaisance, ses efforts pour satisfaire l'éditeur sans lui obéir donnent à ce récit son allure de comédie.