Les médias ne s’intéressent qu’à l’événement, à l’instant, alors que les cités renvoient, elles, à un cadre et à un style de vie, à des comportements liés à une histoire. Aussi fallait-il, pour comprendre la réalité des banlieues, aller à la rencontre de leurs habitants et prendre le temps de les écouter. C’est ce qu’ont fait Jean-Michel Décugis et Aziz Zemouri qui, sans préjugés, ont partagé le quotidien de cette population dont on ne cesse de parler mais qu’on ne va jamais voir, sur laquelle on porte tant de jugements sans avoir jamais sondé ni les esprits ni les cœurs, comme en témoigne cette remarque désabusée d’un étudiant de Villeneuve-Saint-Georges : « Notre avis n’intéresse personne, on ne correspond pas à la moyenne statistique. » Les commentateurs ne retrouveront pas leurs clichés misérabilistes, alarmistes ou faussement positifs. A travers les portraits de Dominique, qui vole l’empoche des chauffeurs de bus, de Shams ed-Dine, casseur dans les manifs anti-CIP, de Mike qui coupe des savonnettes de shit en barrettes dans des locaux à ordures de Garges-lès-Gonesse ou de Claude, qui fait du crack dans les caves de Vitry-sur-Seine, c’est le portrait d’un monde en marge et d’une génération incomprise qui se dessine, une génération chez laquelle la révolte n’a pourtant tué ni l’enthousiasme ni l’humour, une génération qui déclare : « La société, c’est le vice, nous on est le tourne-vice. »

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