Tu es un baptisé comme les autres et, comme les autres, tu demanderas
le pain et le reste. Mais si tu es fidèle à tes dix minutes d'oraison, il
ne se passera pas longtemps avant que tu ne te dises d'une manière
ou d'une autre : mais qu'est-ce que je fais là ? Je n'éprouve rien ou
si peu, si rarement.
Pourtant tu auras maintenu. Plus encore. Tu découvriras qu'à
consentir ainsi à perdre ton temps, c'est toi le gagnant. Gagnant de
quoi ? C'est difficile à dire. Est-ce même possible de bien dire ?
Cependant, tu t'apercevras que tes demandes, au sens strict,
s'estompent finalement dans un «être là comme ça».
Tu es là parce qu'Il est là. Parce qu'Il t'attend. Parce qu'Il t'avise.
Parce qu'Il t'aime. Et toi, tu restes là pour la seule raison qu'Il est
là. Et tu remettras ça demain. Pas question de «marché». C'est
peut-être quelque chose comme de la gratuité.
Dieu se révèle en se cachant. Il se fait rare pour se faire désirer.
Alors, immanquablement, la question surgit au-dedans de nous :
oui ou non, est-ce que je le recherche, est-ce que je l'aime pour ce
qu'il me donne ou pour lui ?