Le XXe siècle a été enfanté par une guerre européenne et par la révolution soviétique. Ce fut une époque d'espérances perdues ou trahies, d'utopies et de crimes de masse, traversée par la promesse et les mensonges de l'Octobre russe.
François Furet n'a cessé de raconter et de penser ce temps chaotique, fort de l'expérience acquise en étudiant de façon problématique la Révolution française, qui fonda la démocratie moderne. La relation imaginaire des hommes du XXe siècle avec le communisme forme le sujet de son maître-livre, Le Passé d'une illusion, essai d'histoire interprétative autant que réflexion philosophique. Il nous montre comment le bolchevisme a fait son nid dans l'héritage jacobin et comment le mythe soviétique a donné à l'Occident, et pour longtemps, la marque du nihilisme (sa correspondance avec Nolte précisant les différences irréductibles qui distinguent à ses yeux fascisme et communisme). Ce volume fait donc la part belle à l'histoire politique et conceptuelle de ce XXe siècle dont François Furet, journaliste au Nouvel Observateur, fut l'un des commentateurs les plus avisés, celui qui en tout cas replaçait la politique au centre de nos débats.
Un itinéraire intellectuel et de nombreux articles publiés dans Le Débat et Commentaire illustrent la part qu'il prit à quarante ans de notre vie intellectuelle. Cette méditation, nourrie par l'Histoire et l'expérience personnelle, s'adresse à notre temps, pour nous dire, ainsi que le formule avec pertinence Pierre Hassner dans sa préface, qu'il y a « peu d'attitudes plus dignes, plus lucides et plus salutaires, malgré toutes ses limites, que celles du libéralisme mélancolique ».
Daniel Rondeau