A l'aube de ce XXI
e
siècle, le collage doit à son tour se mettre au défi. Si l'acte fondamental du collagiste est de peindre sans peinture avec les matériaux mis au rebut par son époque dont il devient par conséquent le témoin privilégié, il ne doit pas se contenter de ce rôle qui deviendrait une manière, voire un maniérisme de l'art. Le collagiste n'est pas qu'un ferrailleur recycleur qui donnerait aux matériaux un autre sens que leur usage social ; il n'est pas seulement un magicien qui redonnerait vie aux images qui n'en ont plus, il est avant tout un acteur et même un cré-acteur.
C'est à ce titre qu'il fige sur la toile ces fragments de concepts, ces confrontations harmonieuses de réalités éloignées et ces symboles collectifs qui construisent assemblages et collages.
Lorsque vous regardez les collages du peintre Schwitters ou les collages du poète Kolar, les collages du plasticien-musicien Coaquette ou ceux du collagiste-affichiste Villeglé, un seul mot vient à l'esprit, une seule sensation vous envahit : ce n'est ni peinture, ni collage, ni assemblage, mais poétique de l'oeuvre, poésie de l'artiste.
L'art - et non pas l'art pour l'art - quand il est matières et signes, quand il est parole et communication, quand il est un fragment du "Nous-Vous" en un autre "Je", quand il fait parler les sens et communique d'âme à âme, quand il crée l'étincelle de la vie qui est ailleurs, cet art là peut renouer avec les valeurs originelles de la poésie de la matière et des signes.
L'art du collage est avant tout poésie, il est la licence poétique du peintre comme la poésie est la licence du littérateur.