Le 22 octobre 1931, le président du Conseil Pierre Laval est accueilli à Washington par l'ambassadeur Paul Claudel. Il est à quarante-huit ans l'une des figures incontournables de la politique française et Time Magazine va le proclamer « homme de l'année ». Quel chemin parcouru pour le fils de l'aubergiste de Châteldon, l'avocat besogneux, le député-maire naguère socialiste d'Aubervilliers, bientôt l'interlocuteur de Staline, Mussolini, Hitler ! Plus incompréhensible lui apparaît l'issue de son aventure terrestre, quatorze ans plus tard, lorsqu'il est conduit dans un fossé de la prison de Fresnes pour y être fusillé. Le feu du peloton d'exécution frappe le mauvais génie de Pétain, l'emblème honni de la Collaboration, qui a souhaité publiquement la victoire du IIIe Reich. Cet homme au parcours heurté, sous ses abords frustes et habiles, recèle bien des secrets. Renaud Meltz, à partir de nombreuses sources inédites, dévoile une trajectoire qui n'avait rien de fatal, où l'argent, les opportunités et l'entourage, l'obsession du pouvoir à tout prix enfin, jouèrent un rôle décisif. Que l'Auvergnat, pacifiste sincère, époux et père aimant, pur produit de la mérltocratie républicaine, artisan des assurances sociales, ait consenti à la mort du monde dont il procédait, voilà le mystère qui est ici exploré. Des lumières nouvelles sont jetées sur ce Français à bien des égards ordinaire, roublard et sûr de lui, qui n'était ni intellectuellement ni surtout spirituellement armé pour affronter les forces nazies réclamant à la France vaincue sa conception de la dignité de l'homme et ses Juifs.
Une somme magistrale, et qui fera autorité.