On étend le linge. Panier. Pinces. La bonne odeur. Je fus ce que tu es, fils, tu seras ce que je suis. Tout se rassemble en ce lieu et en cet instant. Tu es mûr. Ici commence le « règne de la terreur » : pas dans un livre mais dans la chambre ou dans les vécés. Sous la table de la cuisine. Comme si les choses portaient un titre au lieu d'un nom. Le livre n'est là que pour te plier. Une faible quantité de sens y est contenue. Il est l'outil de ta sujétion à la réalité. La poésie de la famille s'y exprime par une série d'images : vécés bouchés, draps de lit sans leur occupant, short vide, inconcevable chantier sous la table où va le genou de ton père, où son pied part d'arrière en avant avec la régularité d'un marteau ou d'un métronome, contrôlant ta présence et ton abandon à ses poids et mesures. Le linge qu'on étendait avant de commencer est celui qui à la fin te contiendra.