Poésie et psychanalyse
La psychanalyse s'établit sur une règle unique, l'association libre. Même si c'est là un oxymore. Sous cet angle du paradoxe, de l'inattendu et de ce qui s'impose semble-t-il librement, une parenté existe entre psychanalyse et poésie, en relation avec le signifiant.
Les questions de la résonance pulsionnelle du signifiant dans le corps, de la finalité d'une cure psychanalytique uniquement constituée de l'exercice de la parole et de l'émergence d'un signifiant éventuellement nouveau sont autant de questions poétiques, mais aussi politiques, telles qu'elles ne peuvent être posées et résolues que par un sujet. Tous les problèmes d'ordre clinique demandent à être ainsi abordés par un tel lien de la psychanalyse et de la poésie.
Plus largement, la relation du poète avec son époque et avec le travail de la langue retrouve en effet le sujet de la psychanalyse dans ses avancées énonciatives, mais aussi à propos de l'impossible à dire ou de traduire, comme vis-à-vis de la contingence du futur, liant la langue à la jouissance. Le traduisible et le transmissible sont particulièrement liés avec le nom, la nomination, et même l'innommable.
Les tentatives de destruction exercée aussi sur les langues aux époques des exterminations de masse, anéantissant les gens eux-mêmes, après avoir annulé leurs actions et leurs désirs, ont fondamentalement cherché à effacer leurs noms et leurs discours, et a contrario le maintien coûte que coûte de la poésie au profit d'une régénération des langues par ces victimes comme par d'autres recoupe ce qu'une psychanalyse peut susciter d'interrogation et de travail libidinal dans la sphère politique pour en changer la logique, en étant antinomique avec celle-ci si elle se contente de son classicisme, donc pour réactiver pulsions, désirs et jouissances.