L'oeuvre coloniale de la France est
actuellement l'objet d'une relecture où la
démarche distanciée de l'historien tente
de se frayer un passage dans le tumulte des
polémiques.
Le temps est venu de découvrir une
réalité plus subtile et plus nuancée, où émergent,
au-delà des Faidherbe, des Gallieni ou des Lyautey,
des figures oubliées mais dont le rôle fut éminent.
Louis Archinard est l'un des conquérants d'empire à
découvrir. Protestant, polytechnicien grâce à la
«méritocratie» et républicain, il appartient à cette
catégorie d'officiers patriotes qui ont activement
participé à la politique coloniale de la Troisième
République de l'époque de la Revanche.
Imposer le pouvoir de la France au delà des mers
impliquait inévitablement le recours à la force face
à des populations peu convaincues des bienfaits de la
«civilisation». Mais un homme comme le général
Archinard a eu une conception beaucoup plus haute
de sa mission. Bâtisseur, il a installé les principaux
rouages de l'Etat colonial sur la Boucle du Niger,
devenu le Soudan français, sous une forme d'administration
directe. D'une bourgade, il a fait une capitale.
Il a inventé un service de renseignement et de police ;
il a créé une fiscalité, construit un système éducatif
et de santé, et bien sûr des unités de tirailleurs et de
spahis.
Ce général, chef de guerre et chef politique, a eu
des idées novatrices en matière d'aménagement
du territoire, intégrant le télégraphe, le chemin de fer
et les pistes carrossables dans une approche à la fois
stratégique et économique. Paternaliste, il s'est
attaché aux Africains jusqu'à pratiquer «le mariage
colonial». Il a même créé un petit royaume
à Sansanding.
Avec Louis Archinard, élevé au rang de héros colonial
par la République française, c'est une autre idée de
la colonisation qui s'offre à nous.