Portraits de femmes magnifiques est consacré au cinéma, ou
plutôt, à treize personnages féminins du cinéma. Sans
doute ai-je pris les films pour des livres comme les autres,
avec ce qu'ils portent en eux d'un monde inconnu et les portraits
de nous-mêmes qu'ils retiennent, depuis notre première vision,
dans les plis de leurs chapitres. Je me suis appliqué à travailler ce
chiné que tissent ensemble les oeuvres aimées et notre propre vie.
J'ai aussi tenté de préserver l'état d'enchantement dans lequel m'a
laissé, à l'origine, le déroulé de la pellicule. J'ai commencé par
Bergman et Persona. C'était le plus près de mon monde. J'ai fini
avec un très beau roman devenu un très beau film : Le Jardin des
Finzi-Contini.
J'avais aussi envie d'écrire deux ou trois choses sur le cinéma en
général, dont celle-ci :
«Je crois depuis très longtemps que la technique du cinéma était
destinée aux gens pauvres. C'est une invention pour compenser
les exigences brutales que la société impose à certaines vies. Un
miroir pour les gens qui n'ont pas le temps de se regarder vivre et
qui rend bouleversant les yeux rouges épuisés, les rides profondes
qu'on n'a pas vu venir. (...) Je crois que le cinéma était fait pour
les enfants des pères que le travail effaçait de leur champ visuel.
Une caméra est un objet de valeur qui aurait dû se transmettre
avec les dots, pour récupérer un peu de la vie qu'on nous vole à
l'âge adulte...»
Christophe Fourvel