Pour libérer l'Évangile
Pour des catholiques contemporains qui ont découvert ce qu'est vraiment l'Évangile, l'image publique de leur Église est à cent lieues de ce qu'ils vivent. En même temps, le christianisme, religion de l'Occident qui a en partie colonisé la planète, se trouve aujourd'hui en concurrence avec les autres grandes religions universalistes, et quasiment stoppé dans son expansion, y compris dans sa branche la plus nombreuse, le catholicisme romain.
D'où la question : l'Évangile n'est-il pas prisonnier de son passé de chrétienté ? Est-il pensable de le débarrasser des formes stéréotypées prises par son langage officiel et par les institutions dont il s'est doté au cours des siècles ? Ou au moins de faire voir que, même dans des cadres strictement contrôlés, de larges marges de liberté existent pour la recherche, la créativité, l'invention de nouvelles formes d'expression et de pratiques ? Peut-on parler de Jésus de Nazareth d'une manière autre que les conciles des IVe et Ve siècles ? Peut-on multiplier les pratiques démocratiques dans l'Église ? Peut-on cesser d'être culturellement décalé ?
L'enjeu, c'est la possibilité pour la « joyeuse nouvelle » qu'est l'Évangile de rejoindre vraiment « toutes les nations » auxquelles il est en principe destiné. À la limite, est-il pensable aujourd'hui d'être non seulement un juif chrétien (ce qui n'a rien de neuf), mais également un hindou chrétien, un bouddhiste chrétien, un musulman chrétien, voire même un agnostique chrétien ? Et ce message est-il, aujourd'hui encore, capable de transformer la vie des individus, et aussi d'influencer la marche des sociétés ? Peut-on libérer l'Évangile ?