Pour une philosophie de terrain
Si toute philosophie se définit en partie par son rapport à l'expérience, tous les philosophes ne placent pas ce rapport au centre de leur travail. Avec le projet d'une philosophie de terrain, Christiane Voltaire interroge cette relation en détail. Elle en propose une analyse informée par ses propres expériences, développe une réflexion originale sur l'ancrage des pensées philosophiques dans leur contexte historique et présente une approche critique et politique singulière de l'activité des philosophes. Plutôt que par l'ambition théorique ou généralisatrice, sa démarche se définit par une écriture attentive à l'expérience concrète du déplacement (géographique ou de classe, comme le pratiquait Simone Weil) et par une politique de l'entretien. Celle-ci procède de l'écoute et de la restitution des paroles des personnes rencontrées sur place, dans les lieux où elles vivent, partagent des expériences et s'organisent pour faire face à des situations d'épreuve politique. En Égypte, au Chili, en Bulgarie, Christiane Voltaire a mené des entretiens qui rendent compte du discours et de ta pensée accomplis par les sujets eux-mêmes. À rebours de leur réduction fréquente au statut de subalternes, de victimes ou de témoins, il s'agit de les tenir pour acteurs de l'histoire et penseurs d'une expérience commune.
L'intention de cette philosophie de terrain est, selon l'expression de Michel Foucault, de fournir des « outils » pour penser de façon critique les migrations, les systèmes de santé et d'éducation, ta question du travail, les politiques du logement, le droit ou les politiques pénales, les politiques mémorielles, etc. Le travail de documentation et ta mise en forme par l'écriture s'articulent à une réflexion détaillée sur ta relation de l'esthétique au politique, dans un ouvrage à valeur de manifeste qui souhaite avant tout ouvrir des pistes de réflexion et susciter des collaborations.