«S'agissant d'ivresse, il n'est pas interdit de jouer sur les lettres des mots Français,
et de noter que le mot IVRE contient celles de IRE, la colère, de RIVE, au bout de la
raison et de la folie, enfin et surtout les lettres de VIE, ce qui conduit à promouvoir,
face au menaçant composé ivre mort, un ivre vif... De fait, les effets sensibles de
certaines substances végétales sur la psychologie humaine ont atteint les sphères
les plus hautes de la présence à soi et aux autres, ont investi l'art, la poésie, les
littératures, la conscience, le sacré, en des manifestations vitales de liberté. C'est
donc de l'ivresse vive, tant par le vin, ce lien culturel entre l'Antiquité gréco-latine,
la Bible, l'islam poétique et mystique, l'Occident chrétien, que par le produit de
céréafes fermentées, de la bière au saké, du whisky à l'alcool de riz, conduisant
aux bardes gaéliques et aux poètes chinois, aux artistes nippons, qu'il va être question
ici. Sujet mille fois traité mais que nous tentons aujourd'hui, Lassaâd Metoui par son
art de calligraphe-plasticien, moi par mes rêveries conduites par le pouvoir des mots,
de célébrer encore et encore.»
A. R.
Tendant à l'envol comme à la chute, parente de la folie, de la transgression,
du rêve, métamorphose de la conscience au-delà de la logique et de la prison
du réel, l'ivresse suscite depuis l'antiquité de superbes symboliques.
Alain Rey et Lassaâd Metoui proposent ici un voyage à travers les époques
et les civilisations à l'écoute de ses plus mémorables témoins. Des textes
sacrés à la littérature profane, des arts plastiques à la poésie, de Rabelais à
Baudelaire, de Shakespeare à Nietzsche, de Proust à Kerouac, d'Abú Nuwâs
à Li Taï Baï et tant d'autres, les plus inspirés parmi ceux qui ont exprimé,
par-delà leurs effets destructeurs, le potentiel de vie, de force, de consolation,
d'inspiration ou de libération des boissons enivrantes.