Un vieux contentieux oppose la famille déchue des
Wang à celle des Ding, dont la prospérité a coïncidé
avec son déclin. Une rancoeur amoureuse vient y
mettre le comble lorsque Wang Liegou voit la belle
qu'il convoite convoler avec Ding Zongwang, tandis
que lui échoit une épouse au visage grêlé. Dès lors,
il n'aura de cesse de faire disparaître son rival : devenu
le moteur de son existence, ce désir de meurtre,
sans cesse déçu et sans cesse ravivé, le propulse à
travers les temps troublés de la guerre sino-japonaise
et des luttes entre nationalistes et communistes,
jusqu'à l'avènement de la république populaire et à
la réforme agraire au début des années 1950.
Autour de cette vengeance impossible, Chi Li
construit un récit tonique et rythmé, jalonné de surprises
et teinté d'humour. Mais ce roman où la grande
Histoire se trouve récrite dans le langage des passions
individuelles délivre aussi un message ironique, qui
signe à lui seul le changement d'époque : car c'est au
propriétaire foncier, cultivé et magnanime, qu'est
donné ici le beau rôle, tandis que le paysan pauvre
assume celui de l'envieux méchant.