Présence de Virgile, publié en 1931 (Librairie de la Revue française - Alexis Redier, éditeur) pour célébrer le deuxième millénaire de la naissance du poète mantouan, est le premier livre d'un jeune normalien de vingt-deux ans déjà étonnamment maître de son style et de son univers. La sûreté érudite, jamais pesante, s'y conjugue avec la grâce poétique, toujours délicate.
En artiste, Brasillach dessine le portrait d'un homme habité par les puissances de la nature (Bucoliques, Géorgiques) et de l'Histoire (Énéide) qui, malgré sa timidité et, parfois, sa gaucherie, n'en est pas moins le mage (et magicien) qui les dompte ou, plus exactement, qui s'accorde sagement à l'ordre qu'elle manifestent sous le tumulte des tempêtes, et qui n'est autre que la beauté resplendissante et redoutable des dieux. Virgile chante donc les pacages, les champs, les héros ou, si l'on préfère, la terre et l'Empire célestes.
Le chant de Brasillach, lui, s'accorde naturellement à cette âme fraternelle, sensuelle et amicale. La politique est certes présente mais, auprès d'Octave-Auguste, c'est surtout Mécène qui est à la manoeuvre. On devine qu'à l'instar de Virgile, Brasillach goûte surtout la « lumière napolitaine, haute, pure, jamais voilée, et cette joie d'exister, simplement d'exister », en contemplant cette merveille que seuls les veilleurs et les éveillés ne profanent jamais, que Brasillach nomme simplement, comme il se doit, « le monde extérieur »
Où l'on s'avise, dans cette miniature enluminée, que le monde extérieur est aussi le monde intérieur. Présence de Virgile, de ce point de vue et de bien d'autres, est une réussite inouïe.