Il s'agit moins, dans ces « trop courts poèmes », d'une découverte du monde que de l'entr'apercevoir un instant, l'espace d'une saisie, entre pouce et index, une pincée de la poussière du Temps, ou, si l'on veut, du réel fugitif, le plus naturel, et le plus immédiatement livré à notre regard quand celui-ci se veut léger, et comme dansant et primesautier.
Sous la gouverne du regard (un rapace, tout de même, on s'en souvient, disait Philippe Jaccottet) une réconciliation avec ce monde - tout à fait libre, joyeuse et joueuse, est envisageable, la langue y jouant sa partie, avec ses trouvailles et ses préciosités, une fois le haïku écarté ; se devinent les traces d'un arrière-pays à contempler, non sans quelques accents plus graves, ici et là, qui révéleraient - mais sur un mode assez proche, du jeté, de l'emporté - les minuscules failles du destin qui se creusent au fil des jours en chacune de nos vies.
P. V.