Rabelais fut un précurseur. Il ne put voir autre chose que l'horizon de son temps ; mais plus grand que les autres, il vit au-delà de leur horizon. En fonction de son temps, il vit plus loin et proposa une idée de l'homme. Idée sans idéalisme, idée fondée sur une constatation et sur une confiance : la plasticité de la «nature humaine», son développement illimité lorsque les conditions favorables lui sont offertes.
La possibilité du développement est la loi essentielle de cette nature, que l'éducateur doit seulement aider à s'épanouir dans les conditions extérieures indispensables. Le milieu favorable permettant un développement total, implique donc l'éducateur. L'éducateur doit connaître à la fois l'adolescent éduqué, les lois du développement humain et l'ensemble des sciences. On exige de lui un don de sympathie pour l'adolescent, un art de le guider, de l'orienter vers l'acquisition des qualités humaines (p. 204).
C'est ainsi qu'Henri Lefebvre perçoit Rabelais qu'il nous présente dans cet ouvrage comme l'un des génies de la pensée française et mondiale.
Cette seconde édition du Rabelais d'Henri Lefebvre s'inscrit dans un mouvement de redécouverte et de réédition du philosophe, à l'occasion du centenaire de sa naissance, et du dixième anniversaire de sa mort. Ainsi, les éditions Anthropos viennent de rééditer : La production de l'espace, Espace et politique, Du rural à l'urbain, L'existentialisme, La fin de l'histoire, Contribution à l'esthétique. Elles préparent quelques autres textes devenus introuvables.