Raqa
L'histoire n'est encore qu'un regard d'enfant
Un enfant se saisit d'un appareil photographique pour la première fois à Raqa, durant l'été 2010 et cadre des visages dans la rue. Il s'amuse parfois à en rogner une partie. Cette situation et la fiction qui va peu à peu en naître est encore un brouillon. Les visages montrés ici respiraient tous l'air commun d'un seul bout de rue, il y a de cela treize mois. Ils se croisaient, s'apercevaient. Le drame syrien n'est pas encore perceptible parmi ces présences qui absorbent notre regard. Il est ici un film transparent, le faisceau d'une intention dont nous choisirons sans doute de recouvrir ces photographies ; un casting. Car regardons encore : les visages disposés sous nos yeux sont ceux de manifestants, de policiers, d'indics, de chabbihas, de mukhabarats, de victimes ; de rebelles, d'indifférents, de pleutres, de torturés. Mais aucun des costumes n'est encore endossé. Chacun est le personnage qu'il sera beintôt mais dans la plus grande discrétion.
L'enfant sait-il de quel côté de l'Histoire vont tomber les visages qu'il fixe ?