Henry Van De Velde nous décrit son périple et celui de sa famille au cours de quarante années mouvementées de l'histoire européenne (1917-1957), à travers la Suisse où il se lie avec Kirchner et Romain Rolland, les Pays-Bas où il projette un musée pour la famille Kröller-Müller, et la Belgique où il est appelé en 1926 pour diriger un nouvel Institut des Arts décoratifs destiné à réitérer à Bruxelles l'expérience de son école de Weimar, devancière du Bauhaus.
En dépit des polémiques attisées par Victor Horta, son école s'ouvre en 1927 dans l'ancienne abbaye de La Cambre. Elle rassemble un corps enseignant d'élite dont la pédagogie, centrée sur la pratique en atelier, influe de manière durable sur la production du pays et bénéficie d'une reconnaissance internationale avec les pavillons de la Belgique aux Expositions de Paris 1937 et de New York 1939.
Parallèlement, il édifie la bibliothèque de l'Université de Gand (1933-1940), avec sa « tour de livres », et devient conseiller artistique auprès des Chemins de Fer belges et des Malles Ostende-Douvres. Ce rôle, il l'exerce aussi auprès du ministère des Travaux publics avant d'accepter une mission analogue, en 1940, au Commissariat général à la Restauration du Pays, placé sous l'autorité de l'administration militaire allemande.
Après-guerre, déprimé par des enquêtes qui se soldent par un non-lieu, il s'installe en Suisse, à Oberägeri, où Alfred Roth et Max Bill veillent sur lui. Il y rédige ses Mémoires et reçoit des personnalités comme Giedion, Neutre, Aalto ou Philip Johnson, intéressées par cet autodidacte, protagoniste de l'Art nouveau, désormais reconnu comme l'un des pères de l'architecture moderne du XXe siècle.