La théorie critique de la société, telle qu’elle s’est développée dans le cadre de ce qu’on appelle parfois l’école de Francfort, se caractérise notamment par le fait qu’elle donne toute son importance aux dominations et aux conflits dans son analyse du monde contemporain. L’une de ses figures aujourd’hui centrales, Axel Honneth, est aussi l’auteur de la théorie de la reconnaissance sans doute la plus systématique et riche en perspectives théoriques et critiques. C’est de cette théorie qu’Emmanuel Renault part dans ce livre, tout en lui apportant des inflexions justifiées d’une part par l’histoire de la théorie critique, d’autre part par l’analyse du temps présent. L’analyse de l’imbrication de la reconnaissance, de la domination et du conflit demande une approche spécifique : l’apport du pragmatisme américain et les débats sociologiques contemporains, en particulier Dewey et Bourdieu, complètent ici le modèle hégélien et les intuitions de Marx. Quelques exemples choisis parmi des objets souvent délaissés par les sciences sociales – la conduite oppositionnelle d’un groupe de punks squatters, le langage protestataire de jeunes de banlieues populaires – mettent à l’épreuve la capacité d’analyse de l’approche proposée par l’auteur, celle d’une philosophie sociale conçue comme une hybridation de la philosophie et des sciences sociales. Une contribution d’importance au cœur des débats les plus actuels.