Germaine de Staël, qui signe "Necker, baronne de Staël-Holstein" a vécu la Révolution française aux toutes premières loges – si elle échappe au massacre, elle connaîtra l'exil, puis la haine privée de Napoléon Bonaparte, et n'aura que trois brèves années pour profiter de son retour en France.
Et quelle rage, chaque fois qu'on lit quelque chose qui la concerne, de constater une fois de plus que sa vie de femme, voire sa vie sentimentale, passent avant l'oeuvre même: oui, sa relation avec Benjamin Constant a compté, mais elle a aussi croisé Goethe et Schiller, et est accueillie dans ses voyages en politique de haut rang.
Sand ou Balzac ne s'y tromperont pas – mais on continue de faire peser sur l'importance de Germaine de Staël les préjugès qui s'exercèrent à son égard. C'est une écrivain, écrivaine comme vous préférez, majeure, émergeant depuis ces mêmes fissures où surgit Chateaubriand, là où le monde est un chaos en dérive, où on tue parfois pour rien – apprentissage pour nos nouvelles époques de crise. Et dans son approche, qu'elle soit narrative comme dans "Delphine", ou si moderne dans "De l'Allemagne", mêlant tous les genres, ou purement réflexive dans ces "Réflexions sur le suicide", c'est bien le centre de gravité qui se déplace. Sexes à égalité, et plus question de sacrifice. Voir comment elle reconstruit, à la fin de ces "Réflexions sur le suicide", le protrait de l'anglaise Jane Gray.
Dans ses dernières années d'exil, elle passera de Petersbourg à Stockholm, d'où l'adresse de ce texte, publié en 1814. Mais ne pas s'attarder à la politesse de forme, pour le prince qui paye : dessous, volcan.
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