Renaissance de l'événement
On assiste de toutes parts au « retour » de l'événement. Aux notions de structure, d'invariant, de longue durée, d'histoire immobile, se sont substituées les notions de chaos organisateur, de fractale, de théorie des catastrophes, d'émergence, de mutation, de rupture... Ce basculement n'affecte pas seulement l'histoire. Il est général à l'ensemble des sciences humaines et atteste une préoccupation nouvelle d'attention à ce qui advient de nouveau dans une interrogation renouvelée sur l'événement.
François Dosse, dont les travaux en historiographie sont connus, met dans cet ouvrage la notion d'événement à l'épreuve du regard de diverses disciplines pour en mesurer la fécondité potentielle. Comme l'a dit Michel de Certeau, « l'événement est ce qu'il devient », ce qui induit un déplacement majeur de l'approche de l'événement, de ses causes à ses traces. Telle est la grande nouveauté que perçoit l'auteur et qui change radicalement notre rapport à l'événement en le défatalisant.
On ne peut donc parler d'un simple « retour » de l'événement au sens ancien du terme. Après la longue éclipse de l'événement dans les sciences humaines, le « retour » spectaculaire de l'événement que l'on connaît n'a, en effet, pas grand-chose à voir avec la conception restrictive qui était celle de l'école historique des méthodiques du XIXe siècle. L'objet de cette investigation est de rechercher les clés de compréhension de l'ère que nous traversons, celle d'un rapport à l'historicité marqué par une événementialisation du sens dans tous les domaines. Plus qu'un « retour », nous vivons donc une renaissance ou un retour de la différence. Que revient-il de l'événement ? Assiste-t-on à un simple retour d'une événementialité factuelle ou à la naissance d'un nouveau regard sur l'événement ? Et surtout, s'est-on posé la question de savoir ce qu'est un événement ?