Fondane était poète et non philosophe. Il l'est devenu pour défendre la cause de la poésie, toujours condamnée à se soumettre aux contraintes de la pensée rationnelle. Il l'est devenu aussi par amitié pour Léon Chestov et, surtout, parce qu'il percevait dans la pensée de celui-ci un écho à ses propres tourments, à sa propre révolte. Fondane, l'un des rares à comprendre la démarche du philosophe de la tragédie, sa « lutte contre les évidences », serait bientôt l'un des principaux représentants de la philosophie existentielle.
Les Rencontrer avec Léon Chestov rassemblent les notes prises par Fondane pendant leurs conversations, les lettres qu'il a reçues du maître et ses propres reflexions. Un portrait extrêmement vivant de Chestov se dessine à travers leurs échanges sur la philosophie, sur les faits du quotidien ou sur une actualité de jour en jour plus inquiétante. Le penseur existentiel fait peuve, souvent, de beaucoup d'humour, même quand il raconte ses souvenirs de la révolution russe. Évoquant tour à tour Husserl, Berdiaev, Gide, Buber, Einstein, Maritain, Malraux et beaucoup d'autres, ce livre constitue aussi un riche témoignage sur la vie intellectuelle des années 1930.