La notion d'influence a été largement discutée en littérature. Au XIXe siècle, l'acception moderne du concept évolue en lien avec la question du genre : entre auteurs, influence peut rimer avec création, mais dès qu'une autrice entre en jeu, on parle volontiers d'imitation passive. Renée Vivien, poétesse, lesbienne, n'échappe pas à ce jugement. Son œuvre apporte pourtant un puissant démenti à cette lecture réductrice. D'abord, parce qu'elle dénie avec force le lien stéréotypé établi par ses contemporains entre les femmes, la nature et la spontanéité de l'écriture. Ensuite, parce qu'à l'inverse de ses homologues masculins sa représentation des femmes ne tient pas du pur fantasme et qu'elle fait du lesbianisme un socle de redéfinition poétique. Enfin, parce que l'ensemble de son œuvre se veut une réflexion métalittéraire en acte, qui repose sur un maillage textuel incroyablement complexe nourri de citations tronquées, de parodies, de fausses références, d'esthétiques multiples et resignifiées.
Camille Islert livre ici une analyse fine et précise, avec un objectif : mettre en lumière l'œuvre de Renée Vivien afin de remédier à une injuste minoration et de montrer par son exemple les ambivalences critiques d'une époque face à la production littéraire des femmes.