Réparer l'eau, quelle bizarre ambition : on répare une maison, un vêtement, une machine... Mais l'eau ?
La pollution vient tout de suite à l'esprit. Mais il y a aussi un autre type de dommage, que le passage en station d'épuration ne fait qu'aggraver. Devenue « ressource » à gérer, « hydrosphère » à dépolluer, voilà l'eau purgée de l'imaginaire et du symbolique dont elle était jadis saturée. Quelle déchéance pour ce qui était, dans la pensée ancienne et médiévale, le principe de toute chose, la matrice des hommes et des dieux, présente avant la lumière dans la Genèse !
Les outrages sont finalement moins infligés à l'eau qu'à nous-mêmes. Avec une eau déchue, on continue certes de rêver, mais de façon appauvrie. Convoquant Léonard de Vinci, Bachelard et Ponge, en passant par Dürer, Courbet ou Pascal Lamy, Olivier Rey s'attache, dans cet essai alerte et sensible, à rendre à l'eau sa dignité. Réparer l'eau, voici donc quel en est l'enjeu : renouer avec des parts de nous-mêmes auxquelles nous avons perdu accès.