Ulrike Draesner dramatise la langue allemande. En la distordant, la pliant et dépliant. En la battant comme on bat un fer chaud, en lui faisant vomir les entrailles, saigner les plaies, lui mettant le couteau sous la gorge, le scalpel sur la peau. Mais aussi en la caressant, dans et contre le sens du poil. Parfois affleure le dialectal, le bavarois, qui donne le mot que l'allemand ne possède pas. Il y a en même temps entrelacs : les mots de la science, de la médecine, de la biotechnologie aussi, sont décortiqués avant d'être mis au contact avec ceux du corps. L'être retrouve ainsi son unité que la perception du quotidien a tendance à lui dérober. S'y ajoute le détour par l'enfance, avec le babil qui, parce qu'il est le royaume des lettres manquantes, nous réapprend à lire les mots comme si nous les percevions pour la première fois.