«De l'inexplicable, du divin, du fait que je me réveille, que je bouge, agis, pense, que je vis, naît la poésie, le dessin, la sculpture, l'écriture, les lignes, les plans, le choix des couleurs, des formes, des fleurs, des pierres, le choix des fragments de pierres, d'un regard, d'une démarche, d'une silhouette, d'une figure humaine, d'une figure de nuage.»
Intimement liée à son travail de plasticien, l'oeuvre poétique d'Arp est encore mal connue. Il y a là une bizarrerie, une injustice. Lui-même affirme clairement qu'il accordait autant d'importance à ses poèmes - sinon davantage - qu'à ses sculptures: «Si par impossible j'étais obligé de choisir entre l'oeuvre plastique et la poésie écrite, si je devais abandonner, soit la sculpture, soit les poèmes, je choisirais d'écrire des poèmes.»
La poésie d'Arp est certes marquée par l'expérience dadaïste et surréaliste, mais son originalité tient en grande part à son refus de toute rhétorique, y compris moderniste, à son parti-pris de simplicité, à son inlassable questionnement sur Dieu, sur le monde et sur l'homme, et surtout à son humour malicieux, parfois extravagant, dont les cocasses trouvailles n'excluent pas la gravité.
L'humour
c'est l'eau de l'eau-delà
mêlée au vin d'ici-bas
Simplicité du geste, simplicité du dire. Sa poésie dit la table et le nuage, le voilier et la forêt, l'ange et la rose. Elle nomme et conte sans décrire ni expliquer, et lorsqu'elle se fait lyrique, c'est à fleur de mots, avec une narquoise pudeur.
Aimée Bleikasten