La vie mouvementée de Claude-Henri de Rouvroy, comte de Saint-Simon (1760-1825), digne d'un roman, n'a rien à envier à celle de son illustre parent, mémorialiste du règne de Louis XIV. Chez lui, point d'intrigues de cour, mais une foule de voyages, de spéculations gigantesques, tant commerciales que scientifiques ou intellectuelles, et de projets établis pour le bonheur de l'humanité. Se réclamant de Charlemagne, son ancêtre supposé, Saint-Simon transforme son existence en une quête de cet idéal grandiose du bien public.
Officier lors de la guerre d'Indépendance américaine, brasseur d'affaires sous la Révolution, emprisonné sous la Terreur, riche sous le Directoire et ruiné sous l'Empire, il se découvre peu à peu comme un brillant philosophe. S'adressant tantôt à Madame de Staël, tantôt à Napoléon ou aux savants de son temps, il tente de se porter en éveilleur et en guide de l'opinion éclairée.
Messie ou illuminé pour les uns, capitaliste ou socialiste utopique pour les autres, Saint-Simon est avant tout un réformateur social soucieux de concilier l'esprit des Lumières et l'avènement de l'ère industrielle, apôtre de l'union européenne. Redécouvrir la singularité de sa pensée, c'est, d'une certaine manière, entreprendre un voyage aux sources du politique.