Samuel de Raffi
Raffi (1835-1888), le « Victor Hugo arménien », légua au crépuscule de sa vie son chef-d'oeuvre et son testament, Samuel. Jamais il n'a autant maîtrisé un style si particulier : une symphonie chatoyante de romantisme et d'exotisme oriental, organisée selon une composition rigoureuse.
Samuel est un prince jeune, beau, courageux et bon mais c'est aussi un idéaliste, sensible et tourmenté. Il organise la résistance pour sauver l'Arménie qui vient d'épouser la foi chrétienne au début du IVe siècle, tout en restant l'héritière de très anciennes traditions païennes mais aussi des apports des Perses, des Grecs, des Romains, de la Chine, d'Israël et des Indes. La puissante Perse, fanatique du culte du Feu, lui livre une guerre sans merci, jalonnée d'holocaustes.
À travers Samuel, Raffi parvient non seulement à jeter les fondements de l'Histoire de l'Arménie et à poser les questions essentielles ; visionnaire, il réussit aussi à prophétiser les guerres apocalyptiques du XXe siècle. Les Arméniens y payeront un terrible tribut. La Turquie dirigée par les aventuristes du mouvement Jeunes-Turcs expérimentera en effet sur eux une nouvelle arme absolue : le génocide. L'esprit de Samuel souffla et l'Arménie survécut.
[Raffi] fut qualifié de « Victor Hugo arménien », et l'on comprend pourquoi à la lecture de ce Samuel considéré comme son maître livre.
Livres Hebdo, Laurent Lemire