Le don au(x) pauvre(s), le don du poème : entre littérature,
anthropologie, histoire et philosophie, Scènes d'aumône réfléchit
au croisement de ces deux scènes. Toutes deux sont des «scènes
primitives» : la première, du lien social dans l'imaginaire occidental
; la seconde, d'un certain ethos lyrique. Une «crise du don»
affecte à la fois les pratiques charitables et l'effusion lyrique au
XIXe siècle. La conjonction n'est pas fortuite. C'est l'hypothèse de
ce livre, qui étudie la relation entre la poésie «moderne» - au sens
que Baudelaire donne à ce terme - et la pauvreté, en sa phénoménalité
également moderne. Qu'advient-il du rapport aux pauvres à
l'âge de la «misère» et du marché ? Qu'advient-il à cet âge de la
conception romantique de la poésie comme «don de la langue»,
telle qu'elle s'allégorise dans le motif du «don du poème» ?
Quelles questions poésie et pauvreté modernes posent-elles à
l'économie qui les suscite en les excluant ? Telles sont les
questions abordées dans cet ouvrage. Où l'on rencontre Hugo,
Desbordes-Valmore, Rimbaud, Mallarmé, Verlaine et bien sûr
Baudelaire, mais aussi Derrida lisant Mauss, Levinas dévisageant le
pauvre, ou encore Michelet, Heidegger et Benjamin réfléchissant
sur la misère non poétisable de l'âge moderne.