En écho à L'Histoire de la sexualité de Foucault, ce livre se nourrit d'un large comparatisme entre les cultures humaines et relie étroitement sexualité et procréation. Le propos intègre la pornographie ou l'allaitement, phénomènes trop souvent dédaignés, pour soutenir une thèse forte : ce qui caractérise la civilisation occidentale tient à l'alignement de la procréation humaine sur l'élevage animal. Depuis l'Antiquité, nous concevons notre reproduction biologique comme le font les éleveurs : polarisation radicale entre les sexes, intériorisation des lois de l'hérédité et sélection.
Le christianisme s'est efforcé durant des siècles de refouler cette conception, au prix d'un rejet de la dimension érotique de la sexualité et au profit de la seule faculté de mettre au monde un enfant - cette nativité qui découlerait de la providence divine. Son déclin, conjugué aux progrès de la médecine reproductive, elle-même directement dérivés des techniques vétérinaires, remet en pleine lumière une visée procréative utilitariste tout comme l'instrumentalisation des corps qu'elle implique. Au fond, l'eugénisme hante l'Occident depuis ses origines et la PMA s'inscrit dans une histoire longue. On est alors en droit de s'interroger sur ce que signifie vraiment le projet d'émancipation dont se revendiquent ses partisans.
Dans un style incisif, ce livre combine érudition et esprit critique. Il traite de la place et du rôle respectifs des femmes et des hommes face à leurs destins érotiques et procréatifs, au-delà des débats aussi peu nuancés que virulents qui entourent le féminisme contemporain.