Dans Soeur Philomène (1861) sont évoqués le couvent,
l'église, un sujet est presque inventé, l'hôpital. Ces lieux étaient
étrangers aux Goncourt. Ils ont enquêté. Leur tableau est étonnamment
précis. L'hôpital les a effrayés et bouleversés. Aussi
ont-ils pratiqué un art visuel de la litote et choisi d'extraire de
ces mondes quelques beautés, de les rendre en artistes. Ils
énoncent clairement ici que la croyance est féminine, liée à
une névrose, que l'état, amoureux et spirituel, de leur héroïne
relève de l'étude clinique. L'âge des mélancolies et des
consomptions «romantiques» est vraiment passé. Leur roman
est le premier fleuron du naturalisme. En même temps s'y
trouve tant de non dit. Suggérant leur propre perplexité, les
auteurs nous laissent face au mystère du sentiment de Barnier
pour Romaine, de la soeur pour Barnier.